Ah bon, si c’était vrai, ça se saurait, et ça se verrait !
Or, quand on regarde autour de nous, quand on écoute les médias,
on a plutôt l’impression que tous les humains sont des crapules !
Mais, au fait, qu’est-ce qu’on entend par saint ?
Le dictionnaire donne cette définition : « Saint = essentiellement
pur, souverainement parfait ».
Là on est mal !
Et pourtant, selon la doctrine chrétienne « Dieu seul est absolument saint. Mais parce qu’il est totalement amour, il invite tous les hommes à partager sa sainteté et le bonheur dont elle est la source ».
Cette définition nous donne droit de penser que ça doit être possible aux êtres humains d’être saints ! Mais à deux conditions : d’une part, extraire de notre pensée l’idée que sainteté = perfection.
La pensée chrétienne est claire : Dieu seul est saint, lui seul est
parfait. Mais tous les hommes sont invités à partager la sainteté et
le bonheur dont il est la source.
D’autre part : envisager la sainteté, non pas comme un point d’arrivée, un état de fait, mais comme un chemin offert par Dieu, par pure gratuité, parce qu’il veut faire de tout être humain, son partenaire qualifié et son interlocuteur privilégié.
Au fond la sainteté, c’est possible, mais à condition de ne pas la déconnecter de la sainteté de Dieu. C’est Dieu qui veut que nous soyons saints, c’est lui qui nous illumine de sa sainteté.
Quand on relit la vie des femmes et hommes, que l’Église a déclaré saints, on remarque que l’Église catholique propose à ses fidèles l’exemple de personnes dont la vie lui paraît avoir clairement mérité le partage de la sainteté divine : elle reconnaît alors officiellement leurs mérites en les proclamant saints par la canonisation. Et un des critères qui guide l’Église, que l’on retrouve dans la vie de tous les saints : c’est le souci du pauvre, du malade, de la veuve, de l’orphelin, de toute personne fragile et sans défense.
Et où donc ont-ils puisé ces mérites ? En prenant au sérieux le message du Christ et en particulier, ses Béatitudes, et en les inscrivant concrètement dans leur vie de chaque jour.
Bienheureux êtes-vous, vous qui êtes pauvres de cœur, artisans de paix, affligés, affamés et assoiffés de justice, miséricordieux, droits, persécutés à cause de vos choix et de vos prises de position pour le plus faible !
Les Béatitudes : ça parle de bonheur : Bienheureux !
Le bonheur, c’est la ligne de fond de toute la Bible :
Dès le Premier Testament, Dieu est affirmé comme la seule source du bonheur authentique : le juste, est celui qui « marche avec Dieu ». Et ce bonheur, dans la Bible, s’accomplit dès ici-bas, par les dons que Dieu fait à l’homme fidèle : longue vie, descendance nombreuse, santé, richesses… Mais pourtant, il y a aussi des justes malheureux, méprisés, persécutés : à ceux-là, Dieu promet une compensation, dont la nature reste cependant voilée et mystérieuse. (le livre de Job est un conte qui raconte ce qui peut arriver au juste).
C’est avec l’enseignement du Christ que se révèle véritablement la nature du bonheur proposé à l’homme par Dieu, celui d’un amour total, absolu, parfait : l’amour même dont Dieu vit dans sa relation Père, Fils, Esprit. Mais sur terre, les humains ne peuvent bénéficier que des prémisses de ce bonheur, qui s’épanouira pleinement au retour du Christ, à la fin des temps.
En définitive, les Béatitudes peuvent être lues comme une introduction à « un mode de vie de bonheur » : le désir de Dieu est que l’homme soit heureux. C’est tout à la fois une promesse et un chemin de bonheur que proposent les Béatitudes. Une promesse de bonheur qui commence à se réaliser dès aujourd’hui : ce bonheur de l’homme, n’est pas d’abord le fruit de son propre effort, mais l’accueil d’un don de Dieu à tous : la communion de vie avec lui. La façon de vivre chrétienne est la réponse à une offre gratuite.
Un chemin de bonheur dont le tracé est suggéré par tout un ensemble d’attitudes du cœur (pauvreté de cœur, simplicité, confiance), de comportements à l’égard d’autrui (miséricorde, volonté de paix), de situations difficiles, (épreuves morales et matérielles, persécutions). Tout ceci se noue en la personne de Jésus qui se présente comme celui en qui s’accomplit pleinement l’aspiration au bonheur. Lui-même a voulu vivre parfaitement l’esprit des Béatitudes, dans sa vie et jusque dans sa mort.
Ce don gratuit de Dieu, celui d’une communion de vie et de joie avec lui, l’homme commencera à l’accueillir en vivant au jour le jour le double commandement de l’amour de Dieu et des autres, comme un chemin inauguré par Jésus. Mais il prendra toute sa plénitude au retour du Christ, à la fin des temps.
Il est intéressant de remarquer que toutes les béatitudes sont au futur, sauf deux : « Heureux les pauvres de cœur, car le Royaume de Dieu est à eux », et « Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous , à cause de moi » , ce qui veut dire que le Royaume de Dieu est là quand quelqu’un accepte de se donner tout entier, ne supportant pas d’être heureux sans les autres, ne supportant pas l’injustice.
Par contre, si tu pleures, tu seras consolé,
Si tu es doux, tu recevras la terre en héritage,
Si tu as faim et soif de justice, tu seras rassasié,
Si tu sais pardonner, ou sur le chemin du pardon, tu obtiendras
miséricorde,
Si tu as le cœur pur, sans calcul, sans arrière-pensées, tu verras Dieu,
Si tu es artisan de paix, tu seras appelé fils de Dieu.
En vivant tout cela, tu es sur le chemin du bonheur promis par Dieu avant d’en vivre en plénitude au retour du Christ, à la fin des temps. Pour le chrétien, agir comme Dieu, être créateur comme lui, se donner comme le Christ, est la véritable source de liberté et de bonheur.
Tel est le chemin ouvert à toute femme, tout homme qui veut donner un sens à sa vie, et qui cherche le plein épanouissement de son existence dans le service des autres.
Bonne fête de Toussaint. Bonne fête à chacune et chacun !
Jean-Yves Lecamp