Finances

Carême et télévision

Allez, je me lâche, une fois n’est pas coutume.

Je n’ai pas vocation à jouer les Don Quichotte, mais je pars en campagne, alors que le Carême pointe son nez. En espérant que ces paroles ne resteront pas vaines comme étaient vaines les joutes de Don Quichotte contre les moulins à vent en Espagne.

La télévision est mon moulin à vent.

Voulez-vous vraiment faire un jeûne de Carême ? Essayer de vivre, un peu, sans la télé.

Il paraît que récemment la municipalité de Saint-Sébastien-sur-Loire a réussi à faire vivre un « jeûne » d’internet à tous ses services. Tout est donc possible.

Pourquoi jeûner de télévision ? Dans mon collimateur il y a en fait moins la télévision que les grands journaux télévisés.

Il se passe des choses très sérieuses en France et dans le monde.
Mais la relation des faits est désespérante.

Elle n’encourage aucune mobilisation. Elle produit les « tous pourris » dont on affuble des responsables politiques. Elle produit les « tous les migrants sont des violeurs (ou voleurs) », au choix, en écho aux actes sauvages de la Nuit de l’An à Cologne.

Elle produit la torpeur : on n’y peut rien ! Elle produit ce que la société veut nous inculquer : consommer, ne pas réfléchir.

Que ce soit pour la rentrée scolaire, pour l’arrivée du printemps (ou de l’hiver), pour les fêtes, les reportages d’année en année sont les mêmes. Tout est ficelé d’avance. C’est du « copié/collé » comme on dit en informatique.

Les présentateurs de télévision, grassement rémunérés, du haut de leur chaire, ont les pouvoirs décuplés des plus mauvais curés d’autrefois :

Ce qu’ils disent est parole d’Évangile.

Où donc est passé le sens critique ? Où conteste-t-on encore les choix de tout le monde ?

La télévision peut détruire quelqu’un en quelques secondes. Elle peut canoniser une personne tout aussi vite : David Bowie valait-il vraiment tout ce tintamarre ?

Une suggestion : Et si on se mobilisait pour exiger d’élire démocratiquement les grands prêtres de l’information ? Au moins nous aurions ceux que nous aurions mérité. D’où vient que leur pouvoir est parfois plus grand que les élus de la république, dont ils peuvent faire ou défaire l’image à leur guise ?

Demandons à ce que les journaux télévisés nous aident à comprendre ce qui se passe. Que les journaux télévisés nous donnent les ficelles pour comprendre la complexité de notre monde et pour pouvoir prendre notre place dans sa construction.

Bannissons les émissions nulles dont la télé regorge. Choisissons les bonnes.

Éteignons la télé quand quelqu’un vient. Prenons le temps en famille de faire autre chose que d’être devant l’écran (écran, faire écran, ce qui empêche de voir… c’est le comble !) Cessons de faire de la télé notre musique de fond à la maison. Vivons autrement.

Cela demande des choix. Cela demande des efforts. Mais justement, le Carême, c’est faire des efforts.

Bon Carême.

Daniel Orieux, curé de Sainte-Marie-de-Doulon


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