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Éclipses et parenthèses

L’éclipse de soleil du mois de mars, joliment cachée à Nantes par de lourds nuages, était pourtant un signe du ciel annonçant d’autres éclipses, en avril, mai et juin.

Pas un week-end en effet à partir de Pâques et jusqu’à la mi-juin, autant dire jusqu’aux vacances scolaires, qui ne soit affecté par un pont ou des vacances. Remarquez que le mot « affecté » n’est pas très gentil. N’est-ce pas plutôt une chance inouïe ? Rien que des vacances et de grands week-ends.

Mais où s’éclipsent-ils donc nos chers concitoyens, derrière quelle lune ?

Y a-t-il une vie entre les week-ends ? Y a-t-il une vie chrétienne durant les vacances ? Jeanne d’Arc d’heureuse mémoire disait : « Messire Dieu premier servi ». Affaire à suivre. De quoi sont signes nos assemblées singulièrement éparpillées durant ces providentiels ponts et vacances ? Où donc s’éclipse Messire Dieu durant ce joli mois de mai ? Nous suit-il sur la route de nos exodes ou exils ?

Qu’est-ce qu’une vie d’homme, de femme, d’enfants ? Est-ce le temps du travail passé péniblement à attendre le prochain week-end ? Notre vie est-elle habitée en permanence, est-elle en éveil ou bien tendue vers un imaginaire repos dont tout le monde s’accorde à dire qu’il est bien mérité. Notre ordinaire, je veux dire les jours qui s’écoulent en dehors des ponts et des vacances, est-il donc si difficile qu’on veuille lui échapper et que grâce à Dieu notre pays nous offre tant de moyens pour y échapper ?

Y a-t-il des moments de notre vie qui seraient des parenthèses, c’est-à-dire des moments auxquels il faut bien sacrifier pour enfin bénéficier, d’autres jours, du bonheur de ne rien faire ?

Je médite sur les lois du travail qui poussent à bout la rentabilité, et les gens. Pour aboutir à ces exodes du mois de mai. Les routes de Noirmoutier, Pornic et La Baule sont prises d’assaut, comme une vaste évasion organisée d’une ville devenue impossible à vivre. Et Dieu y est bien présent et très prié : mon Dieu, faites qu’il fasse beau ! « Pas la peine de partir si c’est pour arriver dans une maison froide et regarder la pluie tomber » crus-je entendre récemment sur le quai du tramway.

Habiter notre travail, habiter notre ville, habiter notre maison, habiter notre famille, habiter la semaine pour mieux habiter la fin de semaine : n’y a-t-il pas une harmonie à retrouver ? Vivre sa vie plutôt que de la fuir ? Mais peut-être n’est-ce pas une fuite ? Celui qui vous parle aime les ponts et les week-ends autant que quiconque : ouf, ils sont partis, on souffle !

Mais le monde continue de tourner pendant ce temps. Et nos frères ont toujours besoin de nous. Et Dieu ne prend pas de week-end.

Réfléchissons : notre vie est-elle aimantée vers les parenthèses, ou bien habitons-nous chaque jour que Dieu fait et nous donne, en citoyen et en chrétien ?

Daniel Orieux


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